Elle devient une écologie de la relation, un système vivant où chaque geste, chaque attention, chaque régulation participe à la santé du lien.
C’est dans cette perspective que je propose deux modélisations complémentaires, au service d’une relation transformatrice.
Une relation transformatrice, qu’est-ce que c’est ?
C’est une relation qui ne se contente pas de relier deux pôles, deux acteurs — qu’ils soient individuels ou collectifs — mais qui agit comme un espace de transformation mutuelle.
La transformation n'est pas passive. Elle nécessite un engagement conscient de prendre soin de soi, de l'autre et de la relation. Le terme "transformatrice" implique que chacun contribue activement à cette évolution et par ailleurs s'en trouve transformé lui-même, faisant de chaque interaction l'opportunité de transformation. Ce qui nécessite d'avoir cette disposition et cette intention en abordant l'interaction.
Une relation transformatrice, dans ce contexte, n'est pas seulement un changement, mais un changement positif, constructif, guidé par l'attention, le soin et le soutien mutuel, et non pas focalisé sur un enjeu d'amélioration de la performance.
Elle repose sur trois piliers :
- La responsabilité : chacun est gardien de soi, de l’autre et du lien.
- La réciprocité : les gestes de bienveillance circulent, se répondent, se régulent, dans une réciprocité qui n'a rien de comptable car il ne s'agit pas d'une approche donnant-donnant, mais d'une approche gagnant-gagnant, pour chacun des deux pôles, pour la relation, et en n'oubliant pas une dimension écologique, à savoir : prendre en compte les effets extérieurs aux deux pôles.
- La culture du lien : la relation est conçue puis cultivée comme un jardin, avec soin, attention et vision partagée.
Modélisation 1 : Les 7 dynamiques indissociables de responsabilité
Cette première modélisation propose une cartographie écosystémique de la relation schématisée ainsi :
Ainsi, il y a pour chaque pôle (un individu ou un collectif), une triple responsabilité :
- prendre soin de soi-même (numéroté 1 pour "Moi" et 4 pour "Toi")
- prendre soin de l'autre pôle (numéroté 2 pour "Moi" et 5 pour "Toi")
- prendre soin de la relation chacun de son côté (numéroté 3 pour "Moi" et 6 pour "Toi")
S'ajoute une 7ème dynamique considérée comme fondatrice et culturelle (numérotée 0) : la co-construction d'une vision commune de la relation, qui devient ensuite une culture vivante à entretenir ensemble.
Je vous propose maintenant de rentrer plus dans le détail en terme de responsabilité pour un pôle donné.
Modélisation 2 : 11 + 10 points de responsabilité
Cette seconde modélisation propose une lecture différenciée des responsabilités de chaque côté de la relation. Elles sont décrites pour un côté donné dans le tableau suivant :
Cette modélisation permet d’entrer dans le détail des postures, des gestes et des ajustements possibles.
Côté “Moi” : 11 points de responsabilité
- 4 responsabilités actives envers moi (1), toi (2), et la relation (5 et 7)
- 4 responsabilités réactives pour soi : inviter l’autre à accepter ma bienveillance sur les 3 dimensions précédentes (2, 4, 6, 8)
- 3 autres responsabilités réactives pour l'autre : valoriser la bienveillance de l’autre côté et le cas échéant le stimuler en cas de défaillance (9, 10 et 11)
Côté “Toi” : 10 points de responsabilité
On retrouve la même structure, les mêmes points, à l'exception du point commun numéro 5 de co-construction et de culture commune de la relation.
Cette modélisation agit comme une grille de régulation : elle permet d’identifier les déséquilibres, de nommer les manques, et de stimuler une co-responsabilité vivante.
La responsabilité de bienveillance de chaque côté ne réside pas seulement à être activement bienveillant. Elle consiste également à observer les comportements de l'autre côté, afin de :
- valoriser et reconnaître les bons comportements,
- signaler et inviter l'autre côté à jouer ses responsabilités de bienveillance si ce n'est pas, ou pas assez le cas, ou si cela peut avoir un impact négatif, sur l'un, sur l'autre ou/et sur la relation.
Complémentarité des deux modélisations
Ces deux modélisations ont été conçues pour des besoins différents :
- La première modélisation à 7 dynamiques de responsabilité agit comme une boussole éthique. Elle offre une vision macroscopique de la bienveillance, en mettant en lumière le système relationnel dans son ensemble. Elle nous aide à comprendre les zones d'attention et la nature de la relation.
- La seconde à 11+10 points de responsabilité offre une vision microscopique et opérationnelle. Elle permet à chaque individu ou collectif de se positionner personnellement et de passer à l'action. En détaillant les responsabilités actives et réactives, elle fournit une feuille de route concrète pour incarner la bienveillance au quotidien. Elle est à considérer comme un support d'apprentissage des nuances de responsabilité d'une relation transformatrice, et comme une grille d'analyse et de régulation.
Ensemble, elles permettent de ritualiser des relations transformatrices sous le sceau de la bienveillance, de les co-construire, de les diagnostiquer, de les stimuler et de leur donner toute leur vitalité dans une approche gagnant-gagnant large.
Réciprocité et reconfiguration bienveillante dans les relations, notamment asymétriques
Même dans les relations marquées par une asymétrie — Parent-Enfant, Soignant-Patient, Enseignant-Elève, Manager-Employé — il est possible d’introduire une reconfiguration bienveillante.
Il s’agit nullement d’instaurer une réciprocité stricte ou symétrique ou de type donnant-donnant en matière de bienveillance, mais de reconnaître que chacun joue sa propre partition de la bienveillance, selon son rôle dans la relation.
Dans une relation asymétrique, cette partition est différente de part et d'autre, mais elle participe à une réciprocité vivante, fondée non sur le devoir, mais sur l’investissement sincère dans le lien.
En cela, il s'agit donc non pas d'une réciprocité de symétrie de bienveillance, mais une réciprocité d'engagement de bienveillance.
Ce principe clé d'une Société et de Territoires de la Bienveillance éclairé ici particulièrement pour les relations asymétriques est applicable pour toutes les formes de relation, y compris celles qui sont théoriquement (1) symétriques, telles que les relations de couple, les relations amicales et les relations de parité.
Cette réciprocité d'engagement permet à ces deux modélisations de rester éthiques et applicables à l'ensemble du spectre des relations humaines.
Plus de précisions sur la reconfiguration bienveillante dans la page Réciprocité et reconfiguration bienveillante.
Je propose également une porte d'entrée constructive et positive à la reconfiguration à travers ce qui unit dans la relation. Plus de précisions dans la page Reconfiguration bienveillante d'une relation par ce qui unit.
En quoi cet élément de modélisation contribue à la robustesse de la bienveillance
Dans le dossier croisant Bienveillance et Robustesse, j'ai consacré une page à l'analyse de mes éléments de modélisation par le prisme de la robustesse. Lien vers la partie analysant en quoi l'échelle de la bienveillance contribue à en faire un concept qui tient vraiment la route.
Glossaire
Concept | Définition | Rôle dans le Modèle |
Écologie de la Relation | L'étude et la pratique de la prise en soin du système relationnel dans son ensemble. Elle pose que le lien (la Relation) est une entité vivante, constitutive et indissociable du bien-être des acteurs (Moi et Toi). | Fournit le cadre théorique et la nécessité des trois zones d'attention (Moi, Toi, Relation). |
Reconfiguration Bienveillante | Le processus actif et conscient par lequel les acteurs de la relation auditent et redéfinissent leur engagement mutuel. Elle vise à contrer le conservatisme relationnel et se décline en deux formes : Structurelle (pour l'asymétrie inhérente) et Corrective (pour l'asymétrie par dérive ou la stagnation). | La démarche périodique pour maintenir l'Écologie de la Relation en santé, en appliquant les 11 dynamiques pour rétablir une réciprocité d'engagement. |
Relation Transformatrice | Le résultat dynamique d'une reconfiguration bienveillante réussie. C'est une relation qui favorise la croissance positive de l'ensemble de l'écosystème. Elle est caractérisée par une bienveillance constante où chaque partie joue sa propre partition pour le bien du lien. | L'objectif final de la bienveillance systémique. Le marqueur d'une relation saine, adaptable et capable de croissance mutuelle. |
(1) J'emploie le mot "théoriquement", car bien souvent, dans la pratique, ces relations symétriques peuvent faire l'objet de jeux de pouvoir et des jeux psychologiques qui développent une asymétrie dans la relation.
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