Des marches de la Bienveillance

 


Ma conviction profonde est que la bienveillance n'est pas binaire - on est bienveillant ou on ne l'est pas (cf Echelle de la Bienveillance en 3 segments). Ce n'est pas un idéal à atteindre et tant qu'on n'est pas arrivé à destination, on ne pourrait trouver motif à satisfaction.


La bienveillance est selon moi un cheminement comme je l'énonce dans ma vision de la Bienveillance.

Le principal étant de décider à cheminer, quel que soit son point de départ. Mais quel est-il ? Mon point de départ, le vôtre, celui de vos proches, de votre foyer, celui des personnes que vous côtoyez, celui de votre entreprise, de votre commune, de l'association où vous êtes bénévoles, de la France ... et cela par rapport à plein de dimensions écologique, sociale, sanitaire, humanitaire, démocratique, spirituelle, ...

L'échelle de la Bienveillance permet de se situer par rapport à ses comportements dans ses différentes sphères de vie, avec des situations où l'on se trouve plutôt dans de la malveillance, plus ou moins conséquentes, ou plutôt dans l'absence de bienveillance ou plutôt dans de la bienveillance.

C'est un premier outil, une première grille de lecture, mais elle n'est pas suffisante. En effet, on peut avoir des pensées bienveillantes, des intentions bienveillantes mais ne pas les pratiquer. On peut aussi ne pas avoir conscience de ne pas être bienveillant, et notamment par méconnaissance des impacts de ses actes, et notamment à moyen/long terme et/ou sur des écosystèmes qui sont éloignés de soi, voire à l'autre bout de la planète.

D'où une deuxième grille de lecture que je propose, intitulée "Des marches de la Bienveillance" pour considérer notre niveau de méconnaissance et en quelque sorte notre maturité par rapport à des enjeux de bienveillance qui traversent la plupart des grandes dimensions de notre société.

Ci-dessous est donné un schéma avec 4 grandes marches à franchir :

  • celle du comblement des méconnaissances sur les symptômes, puis sur les problèmes puis sur les solutions ; une marche qui fait l'objet d'une décomposition en 3 sous-marches que je présenterai ensuite ;
  • celle de la construction de la motivation et éventuellement de la cristallisation de énergies pour penser les transformations à plusieurs ;
  • celle de la mise en mouvement ;
  • celle de persévérance et des feedbacks positifs qui permettent de remettre régulièrement du carburant dans les motivations, avec le sentiment de progresser soi-même et de faire progresser la situation, et pour les actions collectives : solidifier le collectif et les relations interpersonnelles.



Une capacité centrale sur laquelle la bienveillance repose est la lucidité. Une lucidité qui rime avec humilité et vérité. Humilité, car l'humanité a un long chemin à faire après avoir détruit la planète pendant plusieurs décennies. La vérité, car sinon nous restons dans le déni et donc dans l'inaction. 

Une autre condition centrale est le temps que l'on se donne pour faire ce qu'il faut pour franchir les marches (cf mon slogan de la Bienveillance)

Voyons maintenant la décomposition de la première marche. Je me suis inspiré partiellement de la matrice de méconnaissance de l'analyse transactionnelle. Je distingue 3 marches successives :

  • La conscience de symptômes de choses qui ne vont pas bien dans notre société ; en cela, on peut énoncer quantité d'enjeux de la société d'aujourd'hui et de demain : emballement climatique, exploitation des ressources de la planète, pollution, véritable écroulement de la biodiversité, surconsommation, impact de l'usage des nouvelles technologies, des nanotechnologies, des ondes, de l'industrialisation de l'agriculture, des pesticides, des lumières des vitrines et bureaux la nuit, de l'usage des plastiques, des transports maritimes, aériens et routiers, de la malbouffe, de la consommation de produits addictifs, de bipolarisation et de conflits sur presque tous les sujets, ... Il faut aussi ajouter la pauvreté, les pays en guerre, les pays sous dictature ("démocratie" et "élection" ne constituant en aucun cas des critères suffisants de lecture), le manque d'eau et de nourriture dans certains pays, les violences faites aux femmes et aux enfants dans leur foyer, dans leur travail, à l'école, sur les réseaux sociaux, toutes les formes de discriminations, les atteintes à la santé mentale (dépression, troubles de l'anxiété, ...).
  • La conscience des problèmes et enjeux révélés par les symptômes. Ce qui nécessite de prendre de la hauteur et de considérer tout cela par la pensée complexe (cf les travaux d'Edgar Morin), et de ne pas prendre peur face à la complexité. On peut en déduire notamment des urgences climatiques, écologiques, sanitaires, sociales et démocratiques qui nécessitent d'agir tous ensemble dès maintenant. Ces deux niveaux de conscience peuvent mener à la peur et/ou à un sentiment d'impuissance.
  • La conscience des solutions permet d'activer une autre émotion, positive cette fois-ci : l'espoir. Encore faut-il que l'on puisse considérer que les solutions nous semblent à notre portée pour notre situation à nous. Ce n'est pas un mince enjeu, et j'imagine que vous avez déjà entendu autour de vous des discours du type "D'accord, ça marche chez eux, c'est super ! Oui, mais en France, on a une population beaucoup plus importante et ça ne pourrait pas marcher, d'autant plus que le français est reconnu pour être un râleur."



Prendre conscience de l'existence de toutes ces marches (4 marches, dont la première décomposée en 3 sous-marches) me semble très important pour comprendre autrui, ou ce qui n'est pas nous, et en particulier quand on veut aider à franchir des marches. 

En effet, si par exemple on propose son aide avec des arguments qui proposent des solutions, alors que l'autre est dans le déni des symptômes, cela ne peut conduire qu'à de l'incompréhension, des tensions, voire des conflits. Si on veut aider à franchir une marche, il faut se mettre à la hauteur de cette marche. A quelqu'un qui est dans le déni des symptômes, il faut l'aider à voir les symptômes.

Je prends un cas concret : si je propose à un fumeur des solutions pour arrêter de fumer alors que lui-même refuse d'entendre qu'il tousse, c'est peine perdue. Il faut commencer par l'aider à reconnaître qu'il tousse et que sa toux a un lien avec sa consommation de tabac.

Ces deux schémas que je propose comme grille de lecture dans le cheminement de la bienveillance sont en réalité très génériques. Ils sont la déclinaison de schémas que j'avais conçus pour le cheminement de la Qualité de Vie au Travail. On peut donc les décliner sur des sujets spécifiques nécessitant la levée de méconnaissances. Par exemple : la vie dans les EHPAD, l'impact de nos achats, le consentement sexuel, les bonnes pratiques dans nos jardins, le bon usage des réseaux sociaux, ...

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